Prédication du 13 février 2022

Vous avez raté le culte du 13 février dernier ? Retrouvez la prédication de Sara-Claire LOUEDEC ici !

Prédication réalisée d’après la lecture biblique : 2 Samuel, chapitre 11, versets 1 à 15 puis 26 et 27.

Chers amis,

Le récit que nous venons d’entendre n’est pas glorieux. En effet, le roi David, dans ce passage, nous apparaît sous un bien mauvais jour.

Autoritarisme, abus de pouvoir, intrigue, manipulation, mensonge, viol… Quelle panoplie d’actions et de sentiments fort peu reluisants, pour ne pas dire repoussants !

Mais alors, que veut nous dire ce texte ?

Quel enseignement pouvons-nous en tirer pour nos vies, aujourd’hui ?

Plus généralement, et pour chacun d’entre nous, la vie peut-elle se construire sur le mensonge, la manipulation et l’utilisation de l’autre ou bien s’appuie-t-elle sur la confiance et la vérité ?

Dans ce passage du livre de Samuel, nous constatons que David use du mensonge, de la manipulation et du meurtre pour avoir une relation sexuelle avec la femme d’un autre, et pour légitimer cette relation car un enfant viendra à naitre. En effet, après avoir forcé Bethsabée à coucher avec lui (alors qu’il sait qui elle est, et qu’il sait que ce qu’il fait est condamnable), quand il apprend qu’elle est enceinte, il met tout en œuvre pour se tirer d’affaire. David convoque le mari de Bethsabée, Urie, parti combattre pour son roi (lequel roi n’est autre que David lui-même !). N’obtenant rien d’Urie, tant sa vertu est grande, David décide de l’assassiner en faisant de Joab, un fidèle général de son armée, le messager de son arrêt de mort.

Le passage s’achève par ce commentaire : « ce que David avait fait déplut au Seigneur ».

Mensonge, manipulation, meurtre sont condamnés par Dieu.

Ce qui plaît à Dieu, au contraire, c’est la vérité, cette vérité qui est la base d’une relation de confiance, tant au niveau personnel qu’au niveau spirituel.

Vous le voyez sur vos écrans : je vous propose une autre façon de mettre en lumière ce texte. Il s’agit de la lithographie que Marc Chagall a peinte en 1956. Ce tableau symbolise, à sa manière, deux faces qui représentent tout et son contraire : le dur et le doux, le bon et le mauvais. L’homme et la femme, s’ils sont unis dans un même visage, ne se regardent pas. David fait tout pour garder la face afin de pouvoir garder la prestance due à son rang, quand Bethsabée regarde ailleurs, très certainement humiliée par ce qui lui arrive. Unis par la force, mais pas unis par le cœur.

L’ange en haut à droite, peint en rouge et jaune, couleur de feu, est-il un ange ou un démon ? Vient-il condamner David ? Soutenir Bethsabée ?

Je vous propose dans un premier temps de regarder la spirale du mal où mène le mensonge.

I. La spirale du mal :

Avec David, tout commence avec un désir immodéré de posséder. Le grand roi, David le poète et David l’auteur des psaumes, est incapable de se retenir. Voyant Bethsabée, une force de posséder l’envahit. Et comme il l’a fait pour le territoire des Ammonites, David part à la conquête de la femme d’Urie. Il trouve cette femme très belle, et après s’être renseignée sur elle, il la convoque et couche avec elle. David commet cet acte en toute connaissance de cause. Il sait très bien que non seulement il use d’une femme comme il userait d’un objet, mais qu’en plus il met cette femme dans une situation intenable, car elle est déjà mariée.

Bethsabée pouvait-elle résister ? Avait-elle le choix de dire non ? Quels murs dresser face aux assauts d’un roi mû par un désir insatiable ?

Confondant la personne qu’est Bethsabée avec les conquêtes qu’il effectue à la tête de son armée, David laisse libre cours à ses envies.

Laisser libre cours à ses envies. La matrice infernale est activée. Pour accomplir ses desseins, David se ment à lui-même et travestit la réalité. Il se ment à lui-même en imaginant qu’assouvir ses désirs n’aura pas de conséquences.

Il travestit la réalité en considérant que :

  • Bethsabée est une chose à posséder ;
  • Qu’elle n’est pas la femme d’Urie.

Dès lors les choses s’enchaînent : mensonge, adultère, viol, manipulation, meurtre. Désirant couvrir son méfait, David ne fait qu’aggraver sa situation. Impossible de couvrir l’adultère par la manipulation. Le meurtre est son unique recours.

Le mensonge est donc bien à la base de cette spirale infernale. Cet enchaînement de douleur, de trahison et de souffrance, ressemble bien à l’enfer.

Nous venons de voir que le mensonge nous entraine dans une spirale infernale. Voyons maintenant comment la vérité est un acte spirituel.

II. L’absence de parole :

Dans ce passage nous constatons qu’aucune parole de vérité n’est échangée. Nous ne trouvons que des ordres :

  • « Envoie-moi Urie le Hittite » ;
  • « Placez Urie à la pointe du combat ».

Ou alors, nous trouvons des paroles de manipulation, des paroles qui essaient de travestir la réalité : « Pourquoi n’es-tu pas descendu chez toi pour voir ta femme ? ».

Dans ce passage, David ne se met jamais à l’écoute d’une parole qui nourrirait sa conscience, qui le conduirait sur les sentiers de la justice, qui lui permettrait de trouver une relation juste avec lui-même et avec les autres. 

David ne se laisse pas travailler par la parole de Dieu. Il ne s’ouvre pas à la grâce de Dieu.

David ne s’ouvre pas à la parole de Dieu qui transforme de l’intérieur.

Aucune parole n’est reçue. Aucune parole vraie n’est échangée.

J’entends par « parole vraie » des paroles qui s’appuient sur la confiance, sur le pardon, sur l’espérance… Sur l’amour. Non, rien de tout cela.

Juste des paroles instrumentales. Des paroles qui permettent d’atteindre un but, d’assouvir un désir.

On entre donc dans une spirale infernale, celle de l’absence de parole de vérité.

Or, la relation de vérité, c’est la base de la vie chrétienne.

III. La relation en vérité comme base de la vie chrétienne :

Cet épisode de David et Bethsabée est un contre-témoignage de ce que doit être une relation en vérité.

Une relation en vérité et non uniquement sur la vérité. Car la vérité, en tant que notion philosophique, renvoie à un concept intellectuel qui s’inscrit dans le temps et qui évolue en fonction des sociétés et des époques. Ce qui est vrai aujourd’hui risque d’être dépassé demain. Ce qui est vrai de mon point de vue apparait relatif pour une autre personne.

Pour les chrétiens que nous sommes, Jésus est la vérité. Jésus n’est pas un concept intellectuel. Il est une relation.

Une relation d’amour et de pardon qui se nourrit dans l’approfondissement de sa parole. Dans la prière et la lecture de la Bible.

Une parole que nous recevons dans le creux de notre conscience. Une parole qui doit nous mener hors des sentiers de la manipulation et du mensonge, pour aller vers la vérité, la confiance, la transparence.

Cette relation en vérité devient la base sur laquelle chaque chrétien construit sa vie. C’est alors que nous, chrétiens, disciples du Christ, nous témoignerons d’une espérance.

Une espérance qui naît de la rencontre. Car chaque rencontre qui s’effectue « en vérité », en présence de l’Esprit de Jésus Christ qui a façonné notre conscience, nous ouvre un avenir possible.

La spirale infernale du mensonge est alors brisée.

Des paroles en vérité sont échangées. Le royaume de Dieu avance dans chaque rencontre que nous faisons.

Faire résonner la Parole d’amour qui nous nourrit. Parole éternelle.
Être en vérité, voilà la base de notre démarche de témoignage. Je voudrais revenir un bref instant au tableau de Marc Chagall que vous avez eu loisir de contempler.

On y voit, en bas à droite, la main de David, peinte de manière saisissante en deux couleurs. Elle nous interpelle sur la notion de relation. Dieu nous tend la main. A nous de la saisir en vérité, sans ambiguïté, pour construire une relation vraie. Car Dieu, à l’image des deux anges que l’on voit sur le tableau, reste bienveillant, malgré toutes les fautes que nous commettons. Il nous aime, au-delà de nos péchés.

La suite de cette histoire, on la trouve au chapitre suivant. Le prophète Natan va trouver David et l’aide à prendre conscience de l’abomination de ses actes. David reconnaît son péché. Il est pardonné, mais il est puni : l’enfant mourra.

Que le souffle de Celui qui est la vérité, nous éclaire dans toutes nos rencontres.

Amen.

Sara-Claire LOUEDEC

Dimanche 13 février 2022, Rennes

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