Prédication du 23 janvier 2022

Vous avez raté le culte du 9 janvier dernier ? Retrouvez la prédication de Cédric ADADE ici !

Prédication réalisée d’après la lecture biblique : Deutéronome, chapitre 10, versets 12 à 22 et les Psaumes, chapitre 15, versets 1 à 5.

Le texte du Deutéronome, chapitre 10 se conclue en disant que le Seigneur, a rendu Israël, aussi nombreux que les étoiles du ciel. Ce peuple aussi nombreux que les étoiles du ciel, aujourd’hui par la nouvelle alliance établie par le Christ, c’est aussi nous. Oui, nous les chrétiens, croyants de par le monde.

Dans notre vie ordinaire, plusieurs situations troubles nous traversent, certaines attendues, d’autres moins. L’une d’elle retiendra notre attention en ce jour : les vagues de migration sans précédent. Des millions de personnes, poussées par la faim, la peur, la guerre et surtout l’espoir, l’espérance d’un avenir meilleur, viennent vers nous. Certains franchissent la mer Méditerranée sur des embarcations de fortune. Pour eux, il n’y a pas d’alternative. La mort les attend au tournant. Que le tournant soit leur pays ravagé par la corruption et l’oppression ; le dangereux passage vers un eldorado tant rêvé ou bien les conditions méprisables dans lesquelles les personnes des sociétés riches accueillent les plus misérables de la terre.

Que faire ? Que pouvons-nous faire de cette situation ? A ce sujet la parole de l’éternel est claire : « Vous aussi, vous aimerez l’étranger parmi vous, car vous avez été étrangers en Égypte. »

Cette parole prononcée par Dieu à travers la bouche de Moïse est sans ambiguïté. Elle n’appelle pas à des commentaires particuliers mais à l’action. Cette même action qui engage chacun de nous à soutenir notre association Entraide Protestante 35.

Si cette parole se passe de commentaire encore faut-il comprendre pourquoi Dieu nous rappelle cet impératif d’accueillir le migrant.

1. La théologie de l’alliance :

En s’alliant avec Israël, Dieu adresse au monde un message universel. En s’alliant avec ce tout petit peuple quasi inexistant aux yeux des puissants du monde de l’époque (l’Égypte et l’Empire Perse), Dieu témoigne au monde son souci pour ce qui est fragile et vacillant.

Si Dieu s’allie avec ce petit peuple inconnu des puissants de l’époque tant il est misérable, n’est-ce pas pour nous signifier que Dieu est proche des petits, des sans riens, des misérables. Le message que Dieu nous transmet en s’alliant avec ce peuple misérable est le suivant : Dieu n’est pas que le dieu des puissants, mais il est le Dieu tout-puissant. Toute sa création est à ses pieds. Et s’il prend ce peuple misérable entre ses mains, c’est pour nous signifier que Dieu tout puissant est au côté des misérables et des faibles. C’est en cela que Dieu ne fait pas de favoritisme comme nous le dit le prophète. Dieu ne laisse pas corrompre par la faveur des riches. Car toute l’humanité est sa création avec ses riches et ses pauvres.

Dieu tient compte de la fragilité et de la vulnérabilité. Partant de cette vulnérabilité, le Dieu de la Bible insuffle un vent libérateur qui nous délivre de tous nos esclavages. En prenant partie pour ce petit peuple misérable contre les puissants de la terre, Dieu nous dévoile que son alliance et son action pour le monde, vibre à travers un processus de l’oppression. Oui, un processus de libération qui nous libère de tout ce qui nous opprime. Quel que soit l’oppression. Cette alliance avec ce peuple particulier a une vocation universelle : entraîner chaque croyant dans ce processus de libération. Voilà pourquoi il est important pour chacun de nous, de nous inscrire dans l’univers imaginaire décrit par la Bible. De considérer, comme Moïse, que c’était réellement nos pères qui furent en Égypte. Que c’était réellement nos ancêtres qui furent libérés par Dieu, et qu’au-delà de l’imaginaire fondamentalement, que chacun de nous est réellement un migrant sur cette terre.

Notre identification imaginaire nous aide à mieux prendre conscience de la vulnérabilité de nos propres existences et de tous ceux qui nous entourent et l’action libératrice de Dieu dans nos vies. Ainsi, l’alliance de Dieu pour ce peuple misérable doit être comprise, comme le signe de l’action de Dieu dans la vulnérabilité de nos vies.

2. Notre commune condition de migrant sur cette terre :

« Vous avez été des immigrés en Égypte. » Je le disais en début de prédication, nous sommes le peuple nombreux, comme les étoiles du ciel. Cela fait des millénaires que nous ne sommes plus des chasseurs-cueilleurs. La sédentarisation l’a emporté sur l’ensemble de la terre. Certes, sauf qu’aujourd’hui, grâce aux médias modernes, notre horizon mental s’est considérablement élargi. Oui, nous vivons à l’heure de ce qu’on peut appeler le village planète. Comme l’homme a deux jambes, il bouge. Et parfois, pour fuir l’injustice, la misère et l’oppression, il court. C’est la raison de ces grandes migrations.

De même pour nous qui vivons en Occident, notre horizon s’est aussi élargi. Les voyages d’études ou professionnels mettent des centaines de kilomètres entre les membres d’une même famille. Sans parler du numérique qui nous fait voyager à l’autre bout du monde en fonction de la série ou des vidéos que nous regardons. Même si nos corps sont à Rennes, nos esprits voyagent d’un bout à l’autre du monde. De part cette situation, mais aussi notre statut de chrétien, il est temps pour nous de nous voir autrement que comme les citoyens d’un état en particulier mais comme citoyens du monde.

Alors dans ce contexte, que nous reste-t-il comme repère ? Pour le chrétien : juste la parole. Une parole transmise par une longue chaîne de témoins et qui est consignée dans la Bible. Une parole qui certes nous fait réaliser notre vulnérabilité de migrant. Mais une parole qui nous adresse aussi des repères. « Suivre toutes les voies en aimant et en servant ton Dieu de tout cœur et de toute ton âme en observant les commandements et les prescriptions du Seigneur, tel que les instituent pour toi afin que tu sois heureux. »

Deutéronome, chapitre 10 : C’est l’Éternel ton Dieu que tu craindras, c’est à lui que tu rendras un culte, à lui seul que tu t’attacheras, et si tu prêtes serment, c’est par son nom que tu le feras. Il est le sujet de tes louanges, il est ton Dieu ; c’est lui qui a accompli pour toi ces œuvres extraordinaires et redoutables dont tu as été témoin.

Dans ce monde en mouvement et en mutation, dans ce monde où l’homme se trouve seul avec lui-même où tous les repères millénaires se sont effondrés, Dieu nous offre de nous mettre sous sa crainte.

Comprenons le mot « crainte » comme des paroles qui nous aident à vivre plus que interdictions qui nous sommes d’obéir. Relisons le Psaume 15.

Oui, avoir la crainte de l’Éternel, c’est comme j’ai l’habitude de le dire dans mes différentes prédications, c’est s’efforcer de suivre cette recommandation : aimez-vous les uns, les autres comme je vous ai aimé. Comme il nous a aimé. C’est marcher sur ses traces. Nous sommes libres de ne pas suivre ce chemin, mais pour les chrétiens que nous sommes, citoyens du monde, il n’y a pas de meilleure route que celle-là.

Et ces recommandations du Seigneur sont des paroles qui nous aident à vivre, elles replacent la vulnérabilité de l’autre (nos sœurs et frères) devant nos yeux. Il s’agit de la veuve, de l’orphelin et l’immigré dont nous sommes responsables.

Cette veuve, cet orphelin et cet immigré nous interrogent sur nous-même. Ils sont le miroir de notre propre vulnérabilité. Accepter et aider la veuve, l’orphelin et l’immigré, c’est en somme, préserver notre propre humanité.

Il y a dans ce texte un double ressort qui nous aide à y voir plus clair dans la complexité de nos vies et de notre monde :

  • Celui qui consiste à inscrire notre vie dans un récit plus large que notre existence. Faire nôtre l’histoire sainte où Dieu fait alliance avec ce peuple misérable qu’était les hébreux. Et réaliser que cette alliance est celle de la toute puissance qui agit dans la vulnérabilité pour amorcer un processus de libération.
  • L’autre ressort de ce texte consiste à respecter et aider les plus fragiles car les aider nous aide à devenir toujours plus humain. Leur fragilité n’est que le reflet de la nôtre.

Ces paroles, ces commandements compris comme des paroles qui nous aident à vivre, sont porteuses de bonheur. Car le bonheur pour la Bible, consiste à être au service de la veuve, de l’orphelin et du migrant. Ce service s’appuie sur l’amour de Dieu. Il n’a qu’une finalité : la gloire de Dieu. « Observe ces commandements nous dit Dieu, tel que je les institue pour toi aujourd’hui, afin que tu sois heureux. »

Amen.

Cédric ADADE

Dimanche 23 janvier 2022, Rennes

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