Prédication réalisée d’après les textes bibliques de Jean 1 : 1-13 et Romain 14 : 1-4 et 10-12
Imaginons. Imaginons qu’ici et maintenant une faille spatio-temporelle survienne et qu’elle nous transporte, au même endroit, dans ce temple, mais… 100 ans plus tôt : 1923. Regardez autour de vous : vous êtes tous habillés très élégamment, mais très bizarrement !
Nous voici donc dans l’Église de 1923. Savez-vous à quoi ressemble l’Église de 1923 ? Un an avant, en 1922, c’est le début de l’URSS, le fascisme s’installe en Italie. L’exode rural fait que les protestants des villes n’ont pas assez de pasteurs et que les paroisses de campagne se vident. Après la Grande Guerre, les protestants sont de plus en plus pacifistes, mais tout le monde n’en tire pas les mêmes conséquences et les différents courants se dispute sur les questions théologiques : est-ce qu’il faut appliquer le Sermon sur la montagne intégralement et refuser absolument toute violence ? Est-ce qu’il faut mettre en place des structures internationales pour protéger le droit des plus faibles ? Est-ce qu’il faut devenir révolutionnaires et se mettre radicalement au service des plus pauvres, qui sont ceux qui souffrent le plus de la violence ? Et puis il y a des tendances théologiques différentes, des conservateurs, des progressistes… comme aujourd’hui.
Faisons un nouveau saut dans le temps, cinquante ans plus tard : en 1973, il y a 50 ans… L’Église, c’est maintenant l’Église réformée de France, l’ERF, qui s’est structurée. C’est un moment passionnant pour les exégètes, les lecteurs professionnels de la Bible, parce que de nouveaux outils de lecture ont été créés, on creuse, on discute, parfois on se dispute, mais au moins on lit les textes, ça bouillonne ! Théologiquement aussi, il y a beaucoup de réflexions de fond : la Deuxième guerre mondiale a provoqué un bouleversement de la vision du monde et notamment de la question du mal, absurde, extrême, mortel : comment croire encore ? Alors on pense, on discute, on expérimente de nouvelles façons de dire la foi, sérieusement, dans un monde toujours plus complexe. On se méfie des grandes affirmations sur Dieu qui tourneraient le dos aux réalités d’ici-bas, et en même temps on recherche des expressions de foi nouvelles, des formulations qui soient plus justes. On discute, on se dispute… Pas des mêmes choses que 50 ans plus tôt, mais ça reste la réalité de l’Église. Ça a toujours été la réalité de l’Église ! Et c’est ce que je voudrais vous faire toucher du doigt, ce matin, pour comprendre d’où ça vient, et pourquoi c’est une bonne nouvelle…
Ce qui m’amène donc, enfin, aux deux textes bibliques qui nous occupent ce matin. Le prologue de l’évangile selon Jean et un extrait d’une lettre de l’apôtre Paul. Je devrais le dire dans l’autre sens : la lettre de Paul, puis Jean, parce que c’est l’ordre chronologique dans lequel ils ont écrit. En fait, il y a le même rapport d’étrangeté entre ces deux textes qu’entre nous aujourd’hui et notre voyage dans le temps : environ 50 ans les séparent.
Ce dont parle Paul et ce dont parle Jean, c’est au fond la même chose : la foi dans le Christ. Mais ils le font de façon complètement différente, et en utilisant une forme littéraire et des arguments totalement différents. Paul nous parle de gens qui ne mangent pas la même chose et qui, du coup, se disputent et refusent de s’accueillir mutuellement. Jean nous parle de la Parole, Parole incarnée, venue d’auprès de Dieu pour habiter parmi les humains. A priori pas grand-chose à voir, mais on va regarder de plus près.
Paul d’abord, dans la lettre qu’il écrit aux chrétiens de Rome. La communauté des croyants de Rome, au moment où Paul lui écrit, se pose beaucoup de questions. Comme dans toute communauté humaine, ils ne sont pas d’accord entre eux, ce qui cause un certain nombre de remous. Troublée, elle l’est, la communauté de Rome. Sur des questions concrètes, immédiates, quotidiennes. Comment vivre sa foi ? Comment vivre au quotidien ce que la foi, profondément, nous dicte de faire ? Comment vivre sous le regard de Dieu, sérieusement ? Et avec les autres ?
A nouveau, imaginons.
Voici un chrétien de Rome. Il est d’origine païenne, c’est-à-dire qu’il vient d’un milieu où l’on rend un culte aux nombreux dieux de la cité, et à l’empereur. Ce culte consiste essentiellement en offrandes, soit de viande (on tue des animaux pour les offrir aux idoles), soit de vin (qu’on répand sur les autels). Il a écouté la prédication des premiers chrétiens à Rome et il a rencontré le Christ à travers cette prédication. Pour lui, cette rencontre signifie que toutes les pratiques du culte des idoles peuvent être abandonnées, parce qu’elles n’ont plus aucun sens. Le seul Dieu, c’est le Dieu de Jésus-Christ, et Dieu n’a pas besoin de toutes ces offrandes, de ces sacrifices : c’est gratuitement, par grâce, qu’il nous offre son salut. Pour cet homme, le péché ce serait de revenir aux idoles alors qu’il a connu Dieu ; se serait de se soumettre à nouveau à ces idoles. Pour lui, la foi c’est de rendre grâce à Dieu pour la liberté. Liberté qui libère des faux dieux. Mais aussi liberté qui libère de tous les esclavages et du péché. La rencontre avec le Dieu de Jésus-Christ lui ouvre un avenir débarrassé de tout ce qui écrasait sa vie.
Voici un autre chrétien de Rome. Lui est d’origine juive. Jusqu’à une génération en arrière, il y avait beaucoup de juifs à Rome, mais ils ont été expulsés par l’empereur Claude et ceux qui sont revenus sont une minorité. Ce chrétien-là appartient donc à un milieu où vivre la foi au Dieu d’Abraham, d’Isaac et de Jacob signifie trouver des moyens de respecter la loi de Dieu malgré les difficultés. Ce n’est pas nous, protestants, qui pouvons dire le contraire : lorsqu’on est minoritaire, on s’attache à son identité, à sa culture, et souvent c’est bien ça qui permet de survivre. Ne pas lâcher la façon dont on vit sa foi, c’est s’enraciner en Dieu. C’est se tourner vers lui, dans les grandes et les petites choses. Or pour un juif à Rome dans ces années-là, une chose pose problème : le respect des lois alimentaires, ces lois prescrites par Dieu au peuple de Moïse. On ne peut pas consommer, par exemple, de viande qui ait été sacrifiée pour le culte des idoles. Mais la communauté juive est encore trop peu nombreuse pour que les boucheries cacher aient été rouvertes, et acheter de la viande sur le marché est trop risqué. Vivre à Rome pour un juif de ces années-là, c’est donc souvent devenir végétarien, pour respecter Dieu et sa loi. Mais cet homme dont je vous parle, lui aussi, a entendu la prédication et il a cru à l’Evangile de Jésus-Christ ressuscité. Il a rencontré le Christ, lui aussi, et a accueilli dans sa vie la promesse que Dieu, en son fils, renouvelle pour le monde entier. Il est placé devant un dilemme : s’il est toujours juif, il doit toujours se conformer à la loi de Dieu, et les lois alimentaires en font partie. Mais sa foi lui ouvre d’autres horizons. Sa foi lui dicte la confiance dans un homme venu sur terre pour témoigner d’un visage de Dieu que personne, jusqu’à présent, n’avait imaginé. Un Dieu qui aime tant ses créatures qu’il va jusqu’au bout de son amour pour eux. Un Dieu qui désire tant l’amour de ses créatures qu’il ne leur demande rien en échange de sa grâce…
Deux chrétiens. Deux vies différentes. Deux chemins qui se rejoignent. Deux hommes qui, chacun pour lui-même, doit décider ce que signifie la grâce qui survient dans sa vie. Deux hommes qui se côtoient lorsqu’ils sont réunis pour rendre grâce à Dieu pour cette grâce qui survient. Deux hommes qui ont changé de vie, radicalement, pour accueillir le Christ. Deux hommes qui partagent le repas du Seigneur. Mais justement… c’est une question de nourriture qui les sépare.
Pour le premier, le chrétien d’origine païenne, sa foi le pousse à manger de tout. Puisqu’il n’y a plus d’idole, alors les sacrifices n’ont aucun sens et les viandes sacrifiées aux idoles sont comme toutes les autres viandes. Il mange donc de tout, parce que sa foi le lui dicte.
Pour le second, le chrétien d’origine juive, sa foi le pousse à ne pas manger de viande. C’est ainsi qu’il respecte Dieu, le Dieu d’Israël qui est aussi le Dieu de Jésus-Christ. Il ne mange pas de tout, parce que sa foi le lui dicte.
Comment vivre ensemble ? Comment respecter l’autre dans son désir profond d’accueillir Dieu ? C’est toute la question, et vous l’entendez bien, nous n’avons jamais fini de nous la poser… Confronté à cette question très réelle, très concrète, Paul écrit donc aux chrétiens de Rome. Et plutôt que de leur donner des ordres, il fait confiance à leur intelligence. Plutôt que de trancher en disant, celui-là a raison et celui-là a tort, il leur rappelle pourquoi ils sont là, pourquoi ils sont ensemble, et en quoi c’est solide.
Il leur rappelle que vivre ensemble, ce n’est pas un but en soi. Ce n’est pas une obligation morale. C’est une liberté donnée. La liberté d’accueillir l’autre, quels que soient ses scrupules religieux… et nous en avons tous. « Accueillez celui qui est faible dans la foi, sans critiquer ses scrupules. Que celui qui mange ne méprise pas celui qui ne mange pas et que celui qui ne mange pas ne juge pas celui qui mange, car Dieu l’a accueilli. » Voilà le cœur de l’Evangile, bien plus profond, bien plus important que toutes les considérations morales ! Il ne s’agit pas d’être gentils, d’être tolérants, d’être ouverts ou progressistes ! Il s’agit d’entendre l’Evangile ! Accueillez… accueillez l’autre, parce que Dieu l’a accueilli. Il n’y a pas d’autre règle que ça. Ailleurs dans le NT, ça se dit « aime ton prochain comme toi-même ». Mais aime-le vraiment. Accueille-le vraiment. Pas pour être gentil, pour être meilleur que les autres. Mais parce que tu le peux.
Dieu nous accueille tels que nous sommes. Avec nos histoires, nos cultures, nos habitudes. Avec notre façon de vivre notre foi. Avec nos façons de tricher avec notre foi. Avec notre soif d’Evangile, grande ou petite. Il nous accueille tels que nous sommes. Et il nous appelle tous, pas juste quelques-uns, mais tous, devant son tribunal. J’allais dire : il nous accueille dans son tribunal. Son tribunal. Le seul lieu, absolument le seul, où nous ne sommes pas juge. Ni de nous-mêmes, ni de l’autre. Le seul lieu où nous échappons au jugement permanent qui nous fait mourir, qui nous écrase… le jugement de nos vies quotidiennes : pas assez vite ! Pas assez grand ! Pas assez productif ! Pas assez ceci, pas assez cela ! Car nous sommes pour les autres, mais surtout pour nous-mêmes, des juges impitoyables. Heureux, dit Paul (un peu plus loin), celui qui ne se juge pas lui-même ! Le tribunal de Dieu, c’est le lieu où nous échappons à ce jugement de mort. Le tribunal de Dieu, c’est le lieu où nous sommes rendus libres. C’est le lieu où nous pouvons rendre compte à Dieu. Rendre compte, honnêtement, de tout ce qui fait notre vie, des poids et des blessures, des joies et des élans. C’est le lieu d’une vie renouvelée. Le lieu où la grâce nous est donnée, en abondance.
C’est à partir de là, c’est à partir de ce lieu-là, que nous nous accueillons mutuellement. C’est parce que mon prochain est accueilli, comme moi, dans ce lieu-là, que je peux le côtoyer comme un frère, comme une sœur. Alors il devient plus facile d’accueillir celui que je suis toujours tentée de voir comme « celui qui est faible dans la foi ». Qui suis-je pour connaître quelque chose de sa foi ? Seul Dieu entend sa foi. Et moi-même, quand je me sens faiblir, je sais que Dieu m’a donné des frères et des sœurs avec qui partager cette étonnante nouvelle : Dieu a tant aimé le monde qu’il a donné sa vie pour nous sauver de nos dieux de morts, de tout ce qui nous écrase et nous fait mourir. C’est ce qu’on appelle le jugement de Dieu sur nos vies. Nous jugeons à la manière des hommes. Seul Dieu juge à la manière de Dieu. Pour nous faire vivre.
Voilà comment Paul parle aux chrétiens de Rome, il y a presque 2000 ans. Et puis, une cinquantaine d’années plus tard, voici celui que l’on appelle Jean. Il existe déjà plein de lettres de Paul, et d’autres, et puis déjà trois évangiles : Marc, Matthieu et Luc. Pourquoi en rajouter ? Est-ce que ça ne suffit pas, ce qui a déjà été écrit ? Apparemment pas, parce qu’il va parler de la même chose, au fond, mais avec des mots et des concepts très différents.
Jean explique, dans une forme littéraire très belle, dans ce vaste poème, une chose très simple. Il nous dit ceci : vous les humains, malgré votre désir sincère de rencontrer Dieu, lorsqu’il vient en personne dans le monde, vous ne l’accueillez pas. Vous les humains, vous imaginez un Dieu silencieux qui reste planqué dans son ciel à vous regarder de haut, et voilà qu’il survient comme une Parole. Comme la Parole. Comme ce qui va avoir un effet, pas par la violence, mais par le verbe. Lorsque le Christ vient dans le monde, sa simple présence va tout bousculer… et pourtant vous les humains, vous ne le comprenez pas. Il va falloir tout un évangile à Jean pour décliner cette idée. Il va nous dire que le Christ est la lumière malgré nos ténèbres, et qu’il éclaire tout, que la pire noirceur ne peut y pas résister. Ce ne sont pas nos faibles tentatives pour connaître Dieu qui nous le donnent à connaître : c’est la décision d’un Dieu qui fait cette chose tellement étrange, tellement contre-intuitive pour nous, de venir en lumière dans le monde, en Parole dans le monde, pour nous rendre enfants de Dieu.
Voici une Parole qui cherche à se dire. Une Parole qui se fraye un chemin dans le monde. Pas une Parole qui nous serait assenée, forcée dans nos crânes et dans nos cœurs sans nous demander notre avis, pour nous formatter, mais une parole qui vient mendier notre intelligence, notre sensibilité, notre vulnérabilité. Une parole qui vient bouleverser notre certitude de savoir. Une parole qui se fait minuscule pour entrer dans les interstices de nos vies si pleines. Et en même temps, une parole souveraine, la parole de Dieu lui-même, que rien ne peut arrêter, parole créatrice qui remonte aux origines des origines, à Dieu lui-même…
Une Parole qui est un homme. Une Parole qui vient éclairer les hommes. On a l’impression que l’auteur de ces lignes s’emmêle dans ses métaphores. Une Parole qui est à la fois un humain, une lumière, un écho, une idée… mais qu’est-ce qu’il veut dire vraiment ? Qu’est-ce qu’il essaie de dire vraiment, comme lorsque nous aussi nous cherchons nos mots pour comprendre ce que nous voulons dire vraiment, et que nous nous faisons surprendre par ce qui sort de notre bouche ?
Dans l’épaisseur des mots, il semble qu’une petite lueur tremblote, et nous lisons et relisons ces mots : la Parole était la vraie lumière, celle qui éclaire tout humain ; elle venait dans le monde… C’est une Parole qui résonne sans faire de bruit ! Une Parole qui fait de la lumière, qui bouge, qui prend chair. Ce n’est pas d’abord une parole qui parle, c’est une parole qui vient nous toucher dans notre humanité la plus brute, la plus basique : d’abord, comme pour un nouveau-né, ce qui est sollicité chez nous c’est notre vue et notre sens du mouvement. C’est une relation avec quelqu’un qui vient.
C’est ainsi que les ténèbres s’écartent peu à peu, en venant nous solliciter, en venant éveiller notre sensibilité de nouveau-né. Croire, c’est un long apprentissage… c’est un cheminement qui, d’une étincelle dans les ténèbres, nous incite à chercher, à explorer, à exercer nos yeux tous neufs, à nous redresser, à marcher enfin… C’est ainsi que le monde accueille la Parole : comme un nouveau-né. Un nouveau-né qui apprend à voir, à comprendre, à entendre, à saisir des bribes, à faire des liens… Le monde ne reçoit pas la lumière comme une évidence, mais comme une quête qui s’offre. Pour Jean, on pourrait dire que c’est le monde qui est un nouveau-né. Un enfant qui s’éveille à ce qui vient vers lui.
Comment alors accueillir celui qui vient comme un étranger, celui qui n’est pas « de chez nous » ? Comme un nouveau-né… Aucune des normes de ce monde ne peut nous donner la réponse. Rien de ce que nous croyons être la norme ne peut nous garantir que nous accueillerons Dieu « correctement ». Il n’y a pas de norme pour accueillir Dieu, juste un profond désir d’entrer en relation avec celui dont vient la vie véritable.
C’est dépouillés de toutes nos certitudes, de toutes nos richesses, de tout ce qui nous rend forts dans ce monde que nous accueillons Dieu. Dieu sur terre, simple Parole. Parole qui s’adresse à nous comme à un nouveau-né, aux puissants comme aux pauvres, aux remplis de certitudes comme à ceux qui doutent de tout, aux brillants comme aux faibles… Parole qui s’adresse à tous, mais que seuls quelques-uns entendront. Ceux, peut-être, qui ne se laisseront pas détourner par ce qu’ils sont déjà. Ceux qui ne s’accrochent pas à une norme, à des certitudes, à des exigences… mais ceux qui savent qu’ils n’ont rien, au fond, quand ils se tiennent devant Dieu, rien entre eux-mêmes et Dieu, rien qui vienne faire obstacle entre eux et Dieu…
Voici donc Paul, qui parle aux chrétiens de Rome, inquiets de savoir comment vivre en accord avec l’Évangile. Voici Jean, qui parle aux humains de leur incapacité à recevoir Dieu, et pourtant de Dieu qui vient. Et nous voici nous aujourd’hui. Tous, au travers des âges, concernés par la même question : qu’est-ce que ça veut dire, comme ça se traduit dans nos vies, cette question d’un Dieu qui vient parmi nous ? Qu’est-ce que ça change ?
Et tous, au travers des âges, malgré ce qui a été écrit, ce qui a été promis, ce qui a été ouvert de possibilités et de liberté, nous avons le chic pour toujours remettre sur le tapis les mêmes vieilles inquiétudes et les mêmes vieilles questions, parce que ça nous travaille toujours, sérieusement…
Nous pourrions dire comme ceux qui nous ont précédés : non mais sérieusement, Paul, sérieusement, Jean, dites-nous une fois pour toutes, qu’est-ce qu’il faut faire pour être méritant, pour être dans la bonne norme, pour être sûr de ne pas passer à côté de Dieu ?
A cette question, Jésus aurait répondu : Aimez-vous les uns les autres comme je vous ai aimés. D’un air de dire peut-être, ce n’est pas si compliqué ! même si nous savons, nous, que c’est compliqué – n’empêche, le principe est simple !
Paul, lui, répondait : Dieu vous a reçus comme vous êtes, la moindre des choses c’est de vous accueillir mutuellement comme il vous a accueillis et de faire l’effort de tirer de l’amour reçu un amour les uns pour les autres.
Jean, un peu plus pessimiste peut-être (mais il écrivait plus tard et il avait eu le temps de voir à quoi ressemblait vraiment l’Église au bout d’un siècle d’existence), Jean disait : Vous les humains, vous n’avez pas su recevoir Dieu quand il est venu s’incarner dans le monde, et pourtant, il s’est installé parmi vous et vous a fait ses enfants. Il a pris les choses en main et il vous accueille et vous aime, à la vie à la mort. C’est là que commence l’aventure… c’est ça qui, aujourd’hui comme hier, nous donne la liberté pour les débats d’aujourd’hui.
Nous sommes les héritiers de ces paroles transmises. A eux hier, à nous aujourd’hui, il est dit, et nous pouvons le répéter :
Va leur dire !
Va leur dire que je les attends, que je suis déjà en chemin.
Va leur dire que dans un regard échangé, dans une parole vraie, je suis.
Va leur dire que mon secours leur est acquis, que ma main soutient chacun de leurs pas.
Va leur dire que leur sécurité repose dans ma confiance.
Ainsi nous parle, à tous et à chacun, notre Seigneur.
Amen