JEAN ZAY : Un protestant méconnu

Résistant pendant la Seconde Guerre Mondiale et homme politique, le protestant Jean Zay a durablement marqué son époque. Son héritage est encore palpable aujourd'hui.
Jean Zay dans son ancien cabinet de travail, 1936.

DR. © Archives nationales, papiers Jean Zay.

Éléments biographiques

Jean Zay est né le 6 août 1904 à Orléans (Loiret) dans la maison de ses grands-parents maternels, au 19 rue du Parc ; d’un père juif, journaliste et d’une mère protestante, institutrice.

 

Après son baccalauréat obtenu en 1923, il devient journaliste tout en poursuivant des études de droit. Il travailla notamment pour le quotidien Le progrès du Loiret.

 

En 1928, Jean Zay devient avocat. Profession qu’il exercera jusqu’à son élection en tant que député en 1932.

 

Le 30 mars 1931, Jean Zay se marie avec son amie d’enfance Madeleine Dreux. La cérémonie religieuse est célébrée au Temple d’Orléans. Ensemble, ils auront deux filles : Catherine qui verra le jour le 29 octobre 1936 et Hélène, le 27 août 1940. À l’occasion du mariage entre Jean et Madeleine, la famille Dreux en profite pour financer la rénovation du Temple.

 

Jean Zay meurt le 20 juin 1944 assassiné par la milice au lieu dit du « Puits du Diable » (entre Molles et Cusset, dans l’Allier) après quatre années passées en prison.

Son engagement politique

Conseiller général, député, sous secrétaire d’État et ministre du Front Populaire ; Jean Zay a occupé plusieurs fonctions politiques entre 1932 et 1941. À certaines périodes, il a même cumulé plusieurs rôles.

En effet, sous la IIIème République, le cumul d’un mandat local et d’un mandat national est autorisé. De même, en 1936, lorsqu’il est nommé sous secrétaire d’État à la présidence du conseil puis ministre, Jean Zay conserve son siège de député. C’était l’usage à l’époque.
Jean Zay a exercé ses mandats politiques sous les couleurs du PRRRS (Parti Radical, Républicain et Radical Socialiste) auquel il a adhéré dès 1925.

  • 1er juin 1932 – 16 juin 1941 : Député. Élu en 1932, réélu en 1936. Jean Zay sera secrétaire de la Chambre des députés et membre de la commission parlementaire de législation civile et militaire. Il est déchu de son mandat en 1941.
  • 24 janvier 1936 – 4 juin 1936 : sous secrétaire d’État à la présidence du conseil dans le gouvernement d’Albert Sarraut .
  • 4 juin 1936 – 10 septembre 1939 : Ministre de l’Éducation Nationale et des Beaux-Arts.
  • 14 mars 1937 – 11 juillet 1940 : Conseiller générale du Loiret.

Son engagement en faveur de l'éducation et des arts

Durant les trois années où il fut ministre de l’éducation nationale et des beaux-arts (1936-1939), Jean Zay a été particulièrement actif. Aussi bien dans l’éducation que dans les arts, son héritage perdure encore aujourd’hui.

 

Pour l’éducation :

 

Jean Zay a prolongé jusqu’à 14 ans l’obligation scolaire et a dédoublé les classes au delà de 35 élèves.

 

Il a créé :

  • les classes d’orientation,
  • les activités dirigées,
  • le CNRS, Centre National de la Recherche Scientifique
  • L’ENA, École National d’Administration

Il a aussi développé l’apprentissage et le sport à l’école (conjointement avec le ministre des Sports Léo Lagrange).

 

Pour les arts :

 

Au titre des Beaux-Arts, on doit notamment à Jean Zay, la création de plusieurs musées:

 

  • Musée national des Arts et traditions populaires ;
  • Musée d’Art Moderne ;
  • Musée de l’Homme.

 

Il est aussi à l’initiative de la réunion des théâtres lyriques nationaux.

 

L’engagement de Jean Zay en faveur de l’art ne se limite pas aux beaux-arts. Il fit aussi beaucoup pour le septième art, autrement dit le cinéma :

 

  • Création de la cinémathèque française
  • Création du festival de Cannes. Et oui ! Si aujourd’hui, pour vous, la Croisette est indissociable d’un tapis rouge avec défilé de stars, c’est en partie grâce à Jean Zay.

 

Dans la vidéo ci-dessous, vous pouvez entendre un enregistrement de Jean Zay dans lequel il explique les raisons de la création de ce festival

 

Son engagement dans l’armée et la résistance

En septembre 1939, Jean Zay démissionne de son poste de ministre afin de s’engager dans l’armée. En effet, le gouvernement promulgue le 2 septembre 1939 un ordre de mobilisation générale pour tous les hommes âgés de 20 à 48 ans. En tant que ministre, Jean Zay n’est pas concerné par cet ordre de mobilisation générale. Il fait alors le choix de quitter le gouvernement pour partager le même sort que tous les hommes de sa tranche d’âge. Il conserve cependant son siège de député.

 

En 1940, Jean Zay ne se résout pas à la défaite de la France. Dans le but de poursuivre la guerre depuis l’Afrique du Nord, il va rallier le Maroc à bord du navire “Le Massilia” avec vingt sept autres parlementaires.

Lorsque le maréchal Pétain signe l’armistice, Jean Zay est arrêté à Rabat par le régime de Vichy qui l’accuse faussement de désertion.

Après un simulacre de procès, il est condamné, le 4 octobre 1940 à la prison à perpétuité ainsi qu’à la dégradation militaire (Jean Zay était à l’époque sous lieutenant).

 

Jean Zay est emprisonné jusqu’en 1944. Cette année-là, le 20 juin, des miliciens viennent le chercher dans sa prison pour l’abattre. Son corps ne sera retrouvé que le 22 septembre 1946 dans un ravin, mais il faudra attendre le 5 avril 1948 pour que le corps soit formellement identifié grâce à ses empreintes dentaires. Ses obsèques ont lieu à Orléans le 15 mai 1948. Le Pasteur Marc Boegner est chargé du service funèbre.

 

En 1945, quelques mois après sa mort, s’ouvre son procès en révision, à l’issue duquel Jean Zay est réhabilité. Sa condamnation est effacée, il est reconnu comme résistant et élevé au grade de commandant à titre posthume.

 

Charles Develle l’un des miliciens ayant participé à l’exécution de Jean Zay sera traduit en justice en 1953. Condamné aux travaux forcés à perpétuité, il sera libéré à peine deux ans plus tard.

 

Certificat d'appartenance à la résistance intérieure française délivré de manière posthume à Jean Zay le 10 mars 1949.

Certificat d’appartenance à la Résistance intérieure française délivré à titre posthume à Jean Zay, 10 mars 1949. Arch. nat., 667AP/124/2. © Archives nationales (France)

Entrée au Panthéon

Inhumée au cimetière de Cusset en 1946, la dépouille de Jean Zay est transféré au cimetière d’Orléans, sa ville natale en 1948.

 

Depuis le 27 mai 2015 et sur la décision du président de la République, François Hollande, Jean Zay repose à Paris, au Panthéon.

 

Quelques voix se sont élevé contre son entrée au Panthéon. Ainsi, Jean-Frédéric POISSON (à l’époque président du parti démocrate chrétien) et Jacques BOMPARD (président de la ligue du sud, classée à l’extrême droite) considèrent que Jean Zay ne mérite pas autant d’honneurs. Ils reprochent notamment à Jean Zay un poème intitulé Le Drapeau qu’il a écrit en 1924 à propos des “morts inutiles” de la Première Guerre Mondiale et qu’ils jugent antipatriotique.

 

Jean Zay est entré au Panthéon en même temps que trois autres grandes figures de la résistance: Geneviève de Gaulle-Anthonioz, Pierre Brossolette et Germaine Tillion.

En savoir plus

Contact