Retour sur la Semaine de prière pour l’unité des chrétiens

Célébration du mercredi 25 janvier 2022

Je suis aumônière de prison catholique au centre pénitentiaire des femmes de Rennes au sein d’une équipe de 4 femmes. Lorsque j’ai été sollicitée pour être aumônière au centre pénitentiaire a résonné en moi une des phrases de l’Evangile que nous venons d’entendre : « J’étais prisonnier et vous êtes venu me visiter ».

Rendre visite à des femmes incarcérées est une école de dépouillement, d’humilité, de marche au pas de l’autre, comme le Christ a ajusté son pas en rejoignant des hommes sur la route d’Emmaüs.

Ajuster mon pas à celui de celles que je visite, c’est les écouter, entendre leur souffrance accompagner les croyantes sur leur chemin de foi, essayer de répondre à leurs questionnements sur Dieu, à leur pourquoi « Je prie, mais Dieu ne me répond pas, il m’abandonne », c’est leur parler de l’Amour de Dieu pour elles, quel que soit l’acte qui les a conduites en prison.

Ajuster mon pas, c’est aussi réfléchir, en groupe, chaque vendredi sur  la Parole de Dieu qui sera lue le dimanche suivant, voir comment la Parole de Dieu résonne en elles, comment elles peuvent en vivre,  là où elles sont, dans leur division, au travail, comment elles peuvent faire le bien autour d’elle pour une vie plus harmonieuse entre elles, car si la solidarité, l’amitié, l’attention à l’autre sont présentes,  la vie carcérale n’en est pas moins dure : au manque de liberté, s’ajoutent rivalités, jalousie, haine,  violence,  différences culturelles.

Comment faire le bien, comment rechercher la justice, là où elles sont ?

Les deux exemples que je vais vous donner partent d’initiative individuelle de croyantes, mais qui ont eu des effets collectifs.

1) Une femme de l’aumônerie, touchée par l’exclusion violente, injurieuse et haineuse d’une de ses co-détenues qui n’osait plus sortir plus de sa cellule depuis des années, sauf pour aller prendre sa douche ou cas de nécessité absolue. Par le dialogue avec les autres co-détenues pour faire cesser leurs injures, leurs propos haineux, et aussi par ses visites et le dialogue avec la détenue victime, cette femme a réussi à faire taire les propos haineux, et amener la femme victime à sortir de sa cellule pour aller, avec elle, à un atelier de peinture sur soie, une fois par semaine. Ce fut une respiration pour elle, même si elle fut accueillie avec indifférence par les participantes de l’atelier.

2) Lors d’un partage d’Evangile, en Luc 6,27-28 dans lequel Jésus dit : « Aimez vos ennemis, faites du bien à ceux qui vous haïssent… À celui qui te frappe sur une joue, présente l’autre ».
L’une des participantes, que j’appellerai Véra a parlé de ce qu’elle vivait de la part d’une co-détenue de sa division et de la peur qu’elle lui inspirait. De l’échange qui s’en est suivi, il en est ressorti, que la meilleure attitude était de ne pas avoir peur. Ne pas chercher à l’éviter, mais lui sourire quand elle la croiserait, et prier pour elle. Encore, fallait-il comprendre les raisons d’une telle animosité. Les co-détenues de la division présentes au partage ont essayé de voir avec d’autres femmes, étaient-elles catholiques, protestantes, je ne saurais le dire.  Toujours est-il qu’elles ont parlé avec la co-détenue qui inspirait la peur à Véra. Cela a pris du temps, mais les attitudes ont changé, les sarcasmes ont cessé, Véra a réussi à lui sourire, puis à la saluer et avoir quelques échanges avec elle et de ce fait, les tensions dans la division ont diminué.

Je voudrais aussi témoigner de ce que nous vivons avec l’aumônerie protestante. Une fois par an, si possible, lors de la semaine de prière pour l’unité des chrétiens, nous préparons ensemble un temps de prière et invitons les femmes, catholiques et protestantes à venir prier pour l’unité des chrétiens. C’est ainsi que samedi dernier, une 5Oaine de femmes, catholiques et protestantes, ont prié ensemble, comme nous ce soir, avec les mêmes textes.