Prédication
Jésus dit : « Vous êtes la lumière du monde. »
Cette Parole, vous la connaissez : Elle suit, dans l’Évangile selon Matthieu, les béatitudes et ouvre au discours sur la montagne, à l’enseignement de Jésus.
« Vous êtes la lumière du monde. »
Pourtant, nous n’avons pas tellement l’impression d’être, individuellement, indispensable au progrès de l’humanité tout entière ou à la beauté de l’univers.
Jésus nous dit quand même, à chacun de nous individuellement : vous êtes, tu es, la lumière du monde.
Jésus le dit parce qu’il le pense, et il le pense parce que c’est la réalité.
C’est même une réalité fondamentale pour nous.
Il y a, en chacun de nous, une originalité que personne d’autre ne pourrait apporter au monde.
Ce constat ne vient pas de moi, de mon égocentrisme ; Il me vient des autres parfois, il me vient de l’Autre (avec un grand A).
Dans la Bible, et particulièrement pour Jésus-Christ, la personne individuelle a donc un prix infini, ce qui fait et qui fera que nous aurons toujours de la valeur, c’est un amour (Agapé) qui s’attache à notre existence personnelle.
Cela veut dire que nous n’avons pas à mériter notre droit à vivre et à être heureux.
Cela veut dire qu’un handicapé, un malade, un criminel ou n’importent quels quidams peuvent avoir des vies difficiles, mais qu’aucun être humain ne peut perdre cette dignité qui est à l’origine même de l’existence humaine, cette dignité qui est une pure grâce de Dieu : Nous sommes aimés de Dieu et aucune force ne peut aller contre cela.
Quand Jésus nous dit “ Vous êtes la lumière du monde ”, il ne nous fait pas la morale avec sous-entendu une injonction, comme s’il disait : « Recevez la lumière de Dieu et transmettez-là. »
Mais Jésus affirme, comme un état de fait, que nous sommes la lumière du monde.
Il reconnaît, certes, que notre lumière peut être plus ou moins cachée, mais, même alors, elle demeure.
Attention, il ne dit pas « que la lumière de Dieu brille à travers vous » mais il dit que « Votre lumière brille sur ceux qui vous entourent ».
Cela nous est arrivé à tous, de temps en temps d’avoir été « la lumière » pour quelqu’un, rendant le sourire, remettant sur pied, éclairant un peu l’horizon, ouvrant une porte vers la foi, ou donnant la force de pardonner… À chaque fois, la vie a été embellie, et Dieu a été terriblement fier de nous. Vous savez ?
Si Jésus commence sa toute première prédication avec ce message, c’est qu’il y a ici le point fondamental de son Évangile : en tout être humain, il existe une lumière personnelle. C’est la base de la théologie de Jésus, mais aussi de sa façon de vivre tournée vers les autres.
Dans quelques minutes, à l’issue de ce culte, se tiendra l’assemblée générale de l’Entraide Protestante 35 de notre communauté. Ne nous trompons pas : il ne s’agit pas d’une association « attachée » à notre Église, il s’agit bien de notre Église et plus exactement de la partie diaconale (de service) de notre Église de Rennes.
Si la loi française définit le mot « Église » par sa seule activité cultuelle. Nous définissons, nous, le mot « Église » par l’assemblée de celles et ceux qui, dans la foi, dans la confiance, se mettent en chemin dans leur vie et dans le monde, avec Jésus, le Christ.
L’Entraide est le cheminement dans le service, elle met la solidarité et l’attention aux autres en action dans ce cheminement.
Partage, solidarité, engagement, accompagnement, pardon et compassion… Tous ces mots résonnent du message de Jésus-Christ. Je ne citerai pas toutes les paroles qui nous disent que chaque geste, chaque parole, un regard ou un sourire… Chaque manière d’être que nous pouvons avoir et qui apporte une consolation, une espérance est Parole d’Évangile.
Le Psaume 8 nous le rappelle : nous ne sommes rien… Ou en tout cas pas grand-chose. Poussière insignifiante dans l’univers. Et pourtant… Une attention, un amour c’est posé sur nous… Gratuit, sans aucun mérite de notre part…
HYWH ? « Celui qui est… » selon une traduction possible de ce nom qui m’échappe toujours, « Celui qui est… » me dit, dit à chacun de nous, individuellement ce qu’il est appelé à être.
Notre monde est incertain. Tout, autour de nous, semble s’écrouler. La guerre, la violence, la haine semble partout enivrer notre humanité. Des forces maléfiques semblent se mettre en mouvement pour écraser l’humanité et beaucoup de nos contemporains adorent ces nouveaux « veaux d’or ».
Frères et sœurs en Christ. Vous tous mais surtout chacun d’entre vous : Tu es appelé à être « lumière ». Tu crois en Dieu ? Tu espères en Dieu ? Alors entends ceci : Dieu croit en toi, Dieu espère en toi ! Dieu pense à toi. Dieu prend soin de toi.
Le monde qui nous entoure et incertain, terrifiant. Comme vous j’ai peur : peur pour mes enfants, mes amis, mes proches. Peur pour les plus fragiles, peur pour ceux que l’on montre du doigts, que l’on stigmatise… J’ai peur pour moi. Dieu nous abandonnerait-il ???
….
Je pense que nous sommes devant des jours difficiles, troublants, peut-être terrifiant. Il y aura des êtres blessés, des âmes écrasés…
Chrétiens : nous avons notre lumière à tenir ; le meilleur de nous-même… Dieu nous a déjà « relevé », ressuscité pour cela.
Il nous faut, il nous faudra encore et encore, résister, combattre en laissant résonner en nous l’Évangile. L’Entraide de notre communauté nous permet de nous lancer sur ce chemin qui va beaucoup plus loin que son action.
Frères et sœurs, ayez confiance : sur ce chemin difficile Dieu marche avec nous. Il est fidèle, le Dieu de Jésus Christ ! il met dans nos mains tout pour que nous gagnons ce combat. Comme nous l’affirme le Psaume 8 : « Il nous donnes pouvoir sur tout ce qu’il a fait »
Mais où est, où sera notre confiance ?
…
Dans un petit livre que je viens de terminer et qui s’intitule Comment se révolter ?, l’historien Patrick BOUCHERON* écrit :
« L’histoire peut fournir ce kit de survie ou d’autres défenses contre le fatalisme :
Quelle que soit la situation, il n’existe pas d’exemple historique où le pire dure éternellement »
N’oublions jamais que Dieu chemine avec nous.
Amen.
Pasteur Hervé STÜCKER
Rennes, dimanche 16 mars 2025
*Patrick BOUCHERON – Comment se révolter ? – Bayard, 2024
