Prédication tirée du texte de Matthieu 25 : 1 – 13
Veillez à bien faire provision d’huile
Les paroles de Jésus sont vraiment faites pour exercer notre intelligence, en particulier cette parabole très étrange et même choquante.
Alors, comment comprendre cette histoire de 10 filles fiancées à un seul et même homme, ce qui n’est pas un modèle de fidélité ?
Comment comprendre que Jésus appelle sages ces personnes qui refusent de partager leur huile ?
Comment comprendre la terrible sévérité du Seigneur qui ferme la porte et est ensuite sans pitié pour celles qui demandent à entrer ?
Comment concilier cela avec le cœur de l’Évangile du Christ qui est l’amour de Dieu même pour ses ennemis, et la promesse qu’il ne rejette pas celui qui vient à lui ?
Pourquoi est-ce que Jésus invente cette histoire de 10 fiancées pour un seul époux ?
Ce n’est certainement pas pour que nous changions notre conception du mariage, mais c’est une façon pour Jésus d’annoncer d’une manière particulièrement forte que ce n’est plus avec un peuple ou l’humanité que Dieu fait alliance, mais individuellement avec chaque personne, une alliance basée sur l’amour et la fidélité. Les 10 fiancées représentent donc des personnes qui ont déjà répondu à cet appel de Dieu. Toutes se préparent, attendent, espèrent sa présence.
Et c’est bien.
La preuve, c’est que Jésus nous dit qu’elles font toutes les 10 partie du Royaume de Dieu par leur foi (leur espérance de Dieu, leur attente de sa venue dans leur existence).
C’est déjà bien, et nous aurions tendance à penser que ça suffit.
Mais avec cette parabole, Jésus nous montre qu’il existe dans notre vie une chose plus essentielle encore que la foi, une chose dont il est urgent de faire provision quand on le peut encore.
Cette chose, nous dit Jésus, c’est comme l’huile pour une lampe à huile.
Dans la Bible, le symbole de l’huile est bien connu.
Elle évoque les bénédictions de Dieu pour nous.
Tant qu’il fait jour, nous montre Jésus, il est facile de faire provision de cette huile de la bénédiction de Dieu, c’est ce que font les cinq sages.
Les folles, elles, se contentent d’en avoir juste un peu, elles pensent peut-être que si la nuit tombait, il serait alors toujours temps d’aller chercher de l’huile quelque part, ou que quelqu’un d’autre leur en donnerait.
Le problème c’est que ce n’est pas possible.
C’est comme si quelqu’un mangeait n’importe quoi pendant des années, sans jamais prendre de poisson, de légume ou de fruit, sans jamais faire le moindre sport… et que le jour où il tombe malade, il espérait pouvoir en 2 minutes prendre un million de vitamines, et se tourner vers ses amis en leur disant : prêtez-moi maintenant un peu de votre santé.
Malgré toute leur bonne volonté, ce ne serait pas possible.
Cette bénédiction de Dieu qu’évoque ici l’huile, c’est comme une bonne santé, c’est une bonne forme spirituelle,
c’est une tête qui a l’habitude d’observer et de réfléchir,
c’est de l’espérance dans le cœur,
c’est une capacité à aimer, à pardonner,
c’est une vraie bonne relation avec Dieu,… mais construite peu à peu à force de penser à Lui, de Lui ouvrir notre cœur, à force de L’aimer et de Le remercier comme celui qui nous donne la vie.
C’est facile de faire provision de tout cela tant qu’il fait jour, nous dit Jésus dans sa parabole, c’est-à-dire tant que la vie n’est pas trop dure, tant que l’on s’en sort assez facilement et que l’on a alors l’esprit assez libre pour s’ouvrir à Dieu et se laisser construire par lui jour après jour, et faire provision ainsi de bénédictions.
Les folles de la parabole de Jésus se contentent de vivre leur foi un peu au jour le jour, comme ça vient.
La sagesse, c’est de chercher à aller au-delà de ce qui est simplement utile aujourd’hui…
La sagesse, nous dit Jésus, c’est de faire des réserves de bénédiction de Dieu, même si, aujourd’hui cela n’apparaît pas comme vital d’en prendre plus qu’il n’en faut.
On voit dans cette histoire que cette bonne huile est disponible sans problèmes tant qu’il fait jour ; en effet, Dieu donne sans compter. Il n’y a qu’à se servir et en remplir non pas seulement le réservoir de sa lampe, mais des jerrycans entiers !
C’est tout simple à faire, tant que l’on est en forme, mais au plus profond de la nuit, c’est une autre chose pour en trouver… le stock d’huile semble s’être éloigné, c’est bien plus long, bien plus difficile.
C’est un fait d’expérience.
Tant que la vie est relativement facile c’est le bon moment pour se saisir des dons de Dieu et si l’on veut, on peut même en faire comme des réserves.
C’est alors le bon moment de chercher Dieu et d’avoir une vraie relation avec lui, c’est le bon moment d’apprendre, avec son aide, à entrer en relation avec les autres humains et à les comprendre un peu, c’est le bon moment d’apprendre à connaître la Bible et à réfléchir.
Le problème, c’est que dans ces périodes où notre vie est assez facile, il nous semble qu’approfondir encore notre foi ne serait pas tellement une priorité.
Notre foi est là, dans un coin de notre être, apportant sa part de bonheur et de vie, et cela suffit…
Cela semble suffire, et c’est vrai à ce moment-là.
Le problème, c’est que si la nuit tombe et qu’elle dure un peu plus qu’une courte éclipse, … Si nos réserves de foi, d’espérance et d’amour sont un peu juste, on se retrouve comme sans lampe en plein milieu des ténèbres.
C’est à ce moment-là que l’on a besoin d’avoir une réserve de ces dons de Dieu pour nous éclairer et nous réchauffer, c’est à ce moment-là que l’on aimerait pouvoir accueillir la présence et le soutien de Dieu.
Le problème c’est que dans ces moments-là, nous avons du mal à développer notre foi au milieu de révoltes, de souffrances, de préoccupations terribles…
C’est triste, ce n’est pas juste que de telles difficultés se posent au pire moment, mais c’est naturel…
C’est quand il fait beau que l’on construit la toiture de sa maison, même si cela semble alors être un luxe inutile, mais ce serait fou d’attendre que viennent l’hiver et la tempête pour le faire.
C’est la même chose en famille ou avec ses amis, c’est quand ça va plutôt bien qu’il est temps d’apprendre à discuter avec l’autre, apprendre à l’aimer, à lui pardonner, savoir comment l’aider, le comprendre.
C’est essentiel de faire provision de cela parce que c’est cette réserve qui nous permettra d’avancer aujourd’hui et d’accueillir Dieu plus facilement en cas de coup dur.
Ces moments favorables, ça peut être une période de notre vie où matériellement tout va bien, mais pas nécessairement…
Ce que l’on peut dire c’est qu’il existe des périodes où il serait facile de développer sa foi et des périodes où elle est plutôt souffrante, endormie, pleine de ténèbres.
La sagesse, ne serait-ce pas de profiter des moments favorables pour faire réserve de cette chose essentielle qu’est l’huile de la bénédiction de Dieu.
Car effectivement, cela se stocke.
On peut mettre en réserve une ouverture à Dieu, une capacité à prier, à l’attendre, à l’aimer. On peut faire provision d’espérance, provision de bons souvenirs à condition que l’on ait pris la peine, quand ça va assez bien, de voir les signes de l’action de Dieu pour nous.
On peut faire ainsi provision d’amour, de l’amour dont nous avons été aimé.
Nous pouvons aussi faire provision de pardon, provision de louange.
Jésus nous appelle à veiller.
Veiller, c’est se laisser délibérément construire aujourd’hui par les dons de Dieu. Pour le reste, cela arrive à tout le monde de ne pas sentir la présence de Dieu à nos côtés et de s’endormir dans notre attente de Dieu, comme cela arrive à 100% des filles de cette histoire.
Veiller, nous dit ici Jésus, c’est faire provision d’huile, provision de l’huile que Dieu sans cesse nous offre, l’huile de ses bénédictions.
Les fiancées folles prennent leur lampe mais pas assez d’huile.
Cette lampe, c’est leur lampe à elles, précise le texte.
Cette lampe, c’est elle-même, c’est leurs qualités, leur intelligence et leurs connaissances, c’est leur capacité à espérer et à aimer, leur capacité à faire des choix.
Leur lampe, c’est aussi la connaissance de la Bible, puisqu’elles sont dans une attente active de Dieu.
Et dans cette lampe, il y a un peu d’huile, de quoi tenir un moment.
Prendre sa lampe est donc bien.
C’est vrai que nous sommes une source de lumière pour le monde nous dit Jésus au début de l’Évangile (Mat. 5 : 14), avec notre intelligence, notre cœur, notre personnalité.
Et dans notre recherche quotidienne de Dieu nous recevons un peu d’Esprit Saint à mettre dans la lampe que nous sommes.
Mais Dieu n’est pas indifférent à notre détresse et il ne nous abandonne pas quand nous souffrons.
Nous le voyons ici se rendre présent, exactement dans le moment le plus sombre, pour venir à la rencontre de ces filles plongées dans les ténèbres.
D’abord une voix se fait entendre, l’annonçant, réveillant les fiancées, les ressuscitant (nous dit le texte), les mettant sur pied.
Puis sa présence est là pour les soutenir de son amour.
Mais pour les folles qui n’ont pas fait de réserve d’huile, même cette résurrection n’arrive pas à les faire accueillir l’époux. Connaissant Dieu tel que Jésus nous l’a fait connaître, il leur aurait suffi de rester là, dans la confiance et de dire à l’époux qui les aurait trouvées, lui, malgré l’obscurité : “ Seigneur, sauve-moi ” (Mat. 14 : 30) et il l’aurait fait.
Mais par manque de réserve de bénédictions, elles perdent la foi et c’est loin de lui qu’elles cherchent de l’aide.
Elles demandent d’abord à leurs collègues, comptant sur la solidarité humaine pour les sauver. Mais dans ce domaine, ça ne peut pas marcher.
Même ceux qui nous aiment ne peuvent vivre vraiment à notre place ce que nous vivons, ni avoir la foi à notre place, ou espérer à notre place, ou aimer à notre place, ou pacifier notre cœur en pardonnant à notre place.
Finalement, ce sont vers les marchands de bénédictions que les fiancées folles iront chercher un salut bien décevant aussi…
Evidemment, il y a en chacun de nous de la vierge sage et de la vierge folle, évidemment, qui pourrait prétendre être à 100% sage ?
Mettons, comme le propose cette parabole de Jésus, que nous sommes à 50% sage et à 50% dans une recherche superficielle de Dieu.
Nous savons par Jésus-Christ que, toujours, Dieu “ ouvre à celui qui frappe à la porte ” (Mat 7 : 8), qu’il “ ne met pas dehors quiconque vient à lui ” .(Jn 6:37)
Ce n’est donc certainement pas une personne humaine tout entière que Dieu met à la porte, selon cette parabole.
Ce que Dieu laisse à la porte, c’est cette part de folie, de légèreté et d’orgueil humain qui est en chacun de nous.
Alors cet “ Amen, je ne vous connais pas ” de Dieu résonne comme un pardon, un cri d’amour qui ne garde pas contre nous notre mauvais côté, mais qui garde et protège notre meilleure part.
Amen.