Prédication du 13 août 2023

Vous avez raté le culte du 13 août ? Retrouvez la prédication de Sara Claire Louédec, d'après l'Evangile de Matthieu, chapitre 14, les versets 22 à 33. Vous savez, c'est le passage où Jésus rejoint ses disciples dans une barque en marchant sur l'eau.
Prédication tirée du texte : Matthieu 14, 22-33

 

Chers amis, chers frères et sœurs,

 

« Jésus marche sur les eaux » … Histoire cent fois entendue, cent fois commentée, cent fois moquée, peut-être ? … Histoire d’un Dieu fait homme qui nous parle d’humilité, de foi, de confiance, et de salut.

 

Jésus fait preuve d’humilité

Comment définir l’humilité ? Et en quoi Jésus fait-il preuve d’humilité ?

Si vous le voulez bien, je vais commencer par définir l’humilité non pas par ce que c’est, mais par ce que ce n’est pas. L’humilité, c’est le contraire de l’arrogance, de l’orgueil, de la suffisance. L’humilité, c’est la capacité à se remettre en question, c’est la modestie, l’effacement.

 

Revenons à notre texte.

Ce récit se situe juste après l’épisode de la multiplication des pains. C’est-à-dire juste après un récit qui nous relate un miracle. Jésus a réussi à nourrir une foule de 5000 hommes avec seulement 5 pains et 2 poissons !

Un miracle, c’est une action qui dépasse notre entendement humain, quelque chose qui défie les lois de la nature et de la science, et que l’on attribue volontiers à Dieu, ou à une divinité, faute de pouvoir l’expliquer.

C’est donc avec émerveillement et enthousiasme que la foule accueille un miracle. D’ailleurs, les Evangiles nous montrent que plus Jésus accomplit de miracles, plus la foule est nombreuse. Or, la foule est prompt à faire et défaire des rois, à s’enthousiasmer ou à se rebeller, à porter aux nues ou à piétiner.

Jésus connaît les dangers inhérents à l’effet de masse d’une foule. Dans l’Evangile de Jean au chapitre 6, verset 15, nous pouvons lire : « Jésus, sachant qu’ils allaient venir s’emparer de lui pour le faire roi, se retira de nouveau sur la montagne, seul. » Ce verset est le verset qui conclut le récit de la multiplication des pains et des poissons.

Dans notre récit, il est mentionné que Jésus renvoie les foules et ses disciples pour se retrouver seul, et prier. Il veut retrouver un peu de sérénité ; il a besoin de solitude pour affermir sa foi, pour être en tête à tête avec le Père.

 

Jésus aime les foules, car c’est par elles qu’il peut diffuser son message de Paix. Plus il y a de monde à l’écouter, plus fort sera l’impact de sa Parole. Et comme la Parole seule ne suffit pas, Jésus accomplit des miracles, qui viennent étayer ses dires. Dans ces moments-là, nous sentons qu’il apprécie ce rapport à la multitude.

Pour autant, il sait qu’une foule peut parfois s’enthousiasmer trop vite, peut parfois dépasser les bornes, peut parfois se perdre dans des sentiments extrêmes.  Et Jésus sait que les miracles qu’il accomplit au nom de son Père sont à double tranchant.

Alors, au lieu de se laisser galvaniser par la foule, au lieu de se laisser porter par l’enthousiasme d’une foule qui voudrait le faire roi, il la renvoie, et se retire pour être seul.

Jésus fait alors preuve d’humilité. Par sa façon d’agir, il nous rappelle qu’à Dieu seul est la gloire, et que la modestie est une qualité qui mérite d’être cultivée.

Quand nous vivons quelque chose d’extraordinaire, quand la beauté illumine nos vies, sachons reconnaître que Dieu est à l’origine de toute chose, et prenons le temps de nous éloigner des foules pour le louer.

 

Dans ce récit, Jésus nous parle de foi et de confiance

Dès le début du récit, les disciples montrent qu’ils ont confiance en Jésus. En effet, ce ne sont pas des novices : ils connaissent la mer et ses dangers, ils savent lire les nuages et le vent. Le texte nous dit que le vent était contraire, et que les disciples étaient malmenés par les vagues. Si Jésus ne les avait pas obligés à monter dans leur bateau, l’auraient-ils fait ? On peut supposer que non.

Ils posent donc là un premier acte de confiance.

Cet acte autoritaire de Jésus, qui « oblige » ses disciples à prendre la mer invite à prendre de la distance, au sens propre comme au figuré. Prendre de la distance au sens propre, car il éloigne les disciples et renvoie la foule. Ne pas s’emballer par le succès, ne pas tomber dans l’autocongratulation.

Prendre de la distance au sens figuré, car la rudesse des conditions météorologiques fait vite oublier aux disciples les miracles qui rendent euphoriques. En effet, éloignés de la côte de plusieurs km, en pleine nuit, à contre-courant d’une mer agitée, ces marins de l’Antiquité pour qui les eaux profondes sont le domaine de la mort, ont peur. C’est alors que chacun est ramené à sa foi personnelle.

 

Car la foi n’est pas une question de foule, c’est fondamentalement un acte personnel. Nous le reconnaissons bien volontiers : la foi est fragile, et, quand nous sommes frappés par l’adversité, nous devons ré-affirmer notre foi, car elle est ébranlée par les épreuves. C’est alors que Jésus nous dit « Viens ! », comme il invite Pierre à le rejoindre pour marcher sur les eaux.

 

Je vous propose de nous arrêter un instant sur ce que le texte nous dit de Pierre. Relisons les versets 28 et 29 : « Pierre lui répondit : Si c’est toi, ordonne-moi d’aller vers toi sur les eaux. Et il dit : Viens ! Pierre sortit de la barque et marcha sur les eaux pour aller vers Jésus. »

Pierre attend de Jésus un miracle, encore une fois.

« Ordonne-moi » ; c’est-à-dire : fais preuve d’autorité, montre que tu es plus grand que moi, et plus fort que les éléments. C’est vrai que lorsque nous sommes dans la difficulté, nous aimerions que quelqu’un mène notre barque à notre place, et, à travers un geste d’autorité, règle les soucis à notre place. Nous aimerions être portés par une vague miraculeuse qui nous amène sur l’autre rive, à bon port, sans avoir à ramer contre les tempêtes de nos vies.

 

Et voilà que Jésus appelle alors à la rencontre : il tend la main, et il dit « Viens ! ». C’est ainsi que le miracle ne vaut rien par lui-même, s’il n’est pas précédé d’un acte de foi. Tout comme Pierre surmonte sa peur et quitte la barque pour rejoindre son maître, nous devons, nous aussi, nous laisser saisir par Jésus le Christ, accepter la main qu’il nous tend et, dans la foi, vivre les miracles quotidiens de nos vies.

 

Revenons au texte, aux versets suivants (30 et 31) : « Mais en voyant que le vent était fort, il eut peur, et, comme il commençait à s’enfoncer il s’écria : Seigneur, sauve-moi ! Aussitôt Jésus étendit la main, le saisit et lui dit : Homme de peu de foi, pourquoi as-tu douté ? »

Dans un acte de foi, Pierre est descendu de la barque. Mais il prend peur. Car la foi ne fait pas tout. Notre foi met en marche, mais, comme je l’ai évoqué précédemment, elle est vacillante.

Il suffit de voir comme nous sommes parfois embarrassés pour répondre à celles et ceux qui nous interpellent en nous disant : « Et ton Dieu, il est où, quand frappe le malheur, la souffrance, les atrocités de la vie ? » « Ta foi, elle te sert à quoi, quand tu sombres dans la détresse, quand les flèches empoisonnées du malheur te frappent à répétition ? »

 

Si notre foi est ébranlée, c’est que nous nous laissons aller à la peur, comme Pierre qui, apeuré par la mer agitée, commence à couler. La peur, fondement de notre humanité – nous avons peur du danger, peur pour nos vies, peur pour celles et ceux que nous aimons…- est finalement le contraire de la foi. Car la foi, la confiance pleine et sereine en ce Dieu d’amour qu’est le Seigneur Jésus Christ, nous permet d’aller au-delà. Au-delà de nos peurs et de nos doutes, car nous savons au fond de nous que si nous faisons un pas vers le Seigneur, il fera l’autre pas, et nous tendra une main ferme et rassurante.

 

Je vous le disais en introduction : ce texte nous parle aussi de salut.

Si l’on s’attache un peu à une lecture symbolique, on pourrait dire que Jésus, en marchant sur les eaux [comme Moïse a traversé la mer rouge (Ex 14), ou comme Elisée a pris le manteau d’Eli pour traverser le Jourdain à pieds secs (2 Rois 2)], marche sur la mort. Car les eaux, dans la culture biblique, sont synonymes de déluge, de ténèbres, et de mort. Jésus est ainsi revêtu d’une autorité qui lui vient de Dieu.

 

Alors que les disciples sont malmenés par la tempête, Jésus vient à eux en marchant sur la mort, et quand il monte dans leur barque, il apaise la tempête (« Ils montèrent dans la barque, et le vent tomba. »)

Jésus apparaît donc ici comme leur Sauveur, celui qui les délivre d’un danger grave et imminent, et les disciples, reconnaissant alors en lui le Fils de Dieu, se prosternent devant lui.

 

Christ n’a pas abandonné Pierre dans les épreuves, autrement, il l’aurait laissé couler. Lorsque Pierre a pris peur, il lui a tendu la main, et l’a mené en lieu sûr.

C’est le Seigneur Dieu qui nous maintient à flots.

Le miracle ne se réalise que si nous avons la certitude que notre vie entière est dans les mains de Dieu, et que sa présence est bien réelle, même si nous ne la sentons pas toujours. C’est cette présence qui est la source de notre espérance.

Et c’est notre espérance qui nous permet d’aller au-delà de nos limites, c’est notre espérance qui nous permet de croire que l’horizon n’est pas bouché, qu’aucune porte n’est fermée à clé, et que la mort, même si elle semble devoir l’emporter, n’aura jamais le dernier mot.

 

A la lumière de ce récit qui nous redit que nous devons oser crier avec Pierre « Seigneur, sauve-moi ! », prenons la mesure de l’amour infini de Dieu pour nous, et, à l’écoute de sa Parole, redisons quotidiennement notre foi et notre confiance.

 

Amen.

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