Prédication du 17 septembre

Vous avez raté le culte du 17 septembre ? Retrouvez la prédication du Pasteur Jean-Luc Cremer.
Prédication tirée du texte : Matthieu 13 : 1-23

 « Soyons tous des semeurs fous. »

 

Frères et sœurs,

 

« Un homme sortit pour semer ».

 

Cet homme a le geste large, il sème, à la volée, avec générosité !

 

Certains pourraient même dire qu’il n’est pas du tout professionnel !

 

Parce que finalement, il semble qu’il y ait pas mal de grains perdus, sinon, à quoi bon en parler ?

 

Bien sûr, il est logique que quelques grains s’échappent du champ sur lequel ils étaient répandus ! Mais pas de quoi en faire une histoire !!

 

Nous, notre homme, il y va largement !

 

On pourrait se dire à le regarder faire : un amateur celui-là ! Vous savez bien, un de ceux qui souffrent d’un syndrome retour à la terre, et qui sous prétexte que leur arrière- grand-père était paysan, pensent que c’est comme le vélo, ça ne se perd pas !

 

Ou alors, c’en est un qui s’applique à la beauté du geste ! Et il sème avec ampleur, comme pour une chorégraphie !!

 

Peut-être est-ce simplement un négligent, comme ces personnes qui distribuent les pubs par deux ou trois dans les boîtes pour en finir plus vite avec leur paquet !

 

Ça pourrait aussi être un gaspilleur : un de ces garçons qui ont hérité de grandes richesses … et qui ne comptent pas ! L’exploitation est grande et les greniers sont pleins ! Alors on y va !

 

La dernière possibilité, c’est que ce soit un incorrigible utopiste ! Et pourquoi je déciderais, se dit-il, que ce terrain-là ne mériterait pas de recevoir aussi de la semence !

 

Et si malgré tout, contre toute attente, et à l’encontre de l’expérience la plus solide, ça poussait ?!

 

Pourquoi les épines seraient de toute éternité destinée à étouffer le bon grain ?

 

Ne sait-on pas aussi que les racines peuvent faire éclater les murs ? Alors, pourquoi pas quelques misérables cailloux ? Pour ensuite atteindre la terre meuble !

 

Vous allez me dire que, quand même, pour les oiseaux, il n’y a rien à faire, que les graines mangées sont perdues ! Et bien pas du tout ! Je connais des graines, qui, pour pousser, ont besoin d’être d’abord prédigérées par des oiseaux pour pouvoir germer !

 

Je vais vous en raconter l’histoire : il y avait un arbre, au jardin des Pamplemousses qui était le dernier spécimen de son espèce. Un arbre qui produisait des graines qu’aucun botaniste n’avait réussi à faire germer.

 

La situation devenait préoccupante : si cet arbre mourait, une espèce de plus serait rayée de notre planète.

 

Un botaniste plus persévérant, ou plus malin que les autres se demanda ce qui, à l’île Maurice, avait changé entre la période où cet arbre poussait en liberté et aujourd’hui.

 

Vous le savez peut-être ?

Il y avait en ce temps-là dans l’île un gros oiseau bien dodu et très pataud qui s’appelait le dodo.

 

Cet oiseau était si peu habile et si peu habitué aux prédateurs que les hommes n’eurent aucun mal à le chasser et le capturer pour le manger … jusqu’à le faire disparaître de l’île … le seul endroit au monde où il existait.

Exit le dodo.

 

Mais notre botaniste a réfléchi et s’est demandé si cela pourrait avoir un rapport. Il a alors cherché quel oiseau pouvait se rapprocher du dodo … et il a essayé de faire avaler les graines à des dindons …

 

Et là, le miracle a eu lieu : les graines, une fois éjectées dans les excréments du dindon ont pu germer. Sans doute leur coque dure avait-elle été dissoute en partie par les sucs gastriques, l’enveloppe d’excréments leur servant en outre d’engrais … bref, de petits arbres ont germé … et l’espèce est sauvée ! …

Dommage qu’il n’existe pas de graines de dodo !!

 

Mais revenons à notre semeur : toujours imperturbable, il sème !!

Moi, je l’aime bien comme ça, ce semeur un peu fou ! Un homme qui ne se satisfait pas de ce qui a toujours été constaté !! Et je les imagine autour de lui les bons camarades qui ricanent en le regardant faire !

Rira bien qui rira le dernier !

 

Et si finalement, nous, chrétiens, nous étions tous des semeurs-fous !

Que faisons-nous en effet de plus raisonnable ?

 

Nous baptisons de tout petits enfants et pourtant, rien ne nous dit d’avance ce que sera la qualité de leur terre ?

 

Comme ce semeur nous posons là un geste utopique : ou plutôt, un geste d’espérance !!

 

Que sera le terrain ? Nous le découvrirons, plus tard, peut-être, mais nul ne peut encore le dire !

Et ça ne nous arrête pourtant pas !!

 

Nous sommes, ce faisant, la main d’un semeur qui de là-haut a décidé de semer vraiment largement, à la volée, et sur la terre entière !!

 

« Allez, et de toutes les nations faites des disciples, les baptisant au nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit, et enseignez-leur à pratiquer tout ce que je vous ai commandé. »

 

Nous nous efforçons, aussi, contre toute évidence, de travailler avec patience et détermination pour que cette bonne nouvelle qui a éclaté il y a plus de 2000 ans, un beau matin de Pâques, soit transmise, à nos enfants, à nos jeunes, à des adultes, qui, un jour, poussent notre porte, à ces jeunes couples que nous accompagnons dans nos préparations de mariage !

 

Nous faisons là œuvre de cultivateurs pragmatiques et persévérants !

 

Et, au lieu de nous résigner en voyant le sol pierreux, ou de nous inquiéter en voyant gagner les épines, nous la préparons cette terre !!

 

Nous y apportons tous nos soins !

 

Nous nous efforçons, jour après jour de la labourer, l’amender, l’engraisser, la traiter … bref, de lui donner toutes ces chances d’être porteuse d’une récolte généreuse.

 

Tous ces soins, concernent bien sûr chacun d’entre nous : il s’agit, pour tous, de cultiver une familiarité avec la parole, de démontrer, par l’exemple, la pratique des valeurs chrétiennes que sont la solidarité, l’écoute et le respect mutuels.

 

Mais nous pouvons faire encore mieux, et à l’image de notre semeur surtout, nous pouvons cultiver ce regard d’espérance porté, malgré tout, sur notre monde.

 

Car si l’espérance est bien une vertu chrétienne, c’est surtout parce qu’elle témoigne que rien, ni personne, ne se réduit jamais aux apparences, et qu’il faut apprendre à discerner au milieu du brouhaha du monde ces signes qui nous disent que rien n’est jamais perdu, que tout reste toujours possible.

 

Si nous tous qui sommes réunis ici, et ailleurs, dans toutes les églises, dans tous les temples, arrivons à transmettre ce regard-là à ceux qui nous entourent, nous leur changerons leur approche du monde.

 

Et, soyons en sûrs, ils y puiseront beaucoup de force !!

Alors. Devenons tous des laboureurs de sols pierreux, des cultivateurs persévérants, mais, d’abord, devenons des semeurs fous, des semeurs utopistes, des semeurs d’espérance ! On pourra alors voir des fleurs !

Amen

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